Les composantes culturelles
La patrimoine culturel actuellement conservé porte surtout le cachet de la période islamique. Des maisons et des mosquées séculaires construites en terre séchée côtoient avec le célèbre minaret octogonal pierreux de l'époque mérinide. De même, les vestiges d'anciens qsour et hameaux désertés ou détruits subsistent encore tout comme les mausolées et les bibliothèques des marabouts et des savants dont les œuvres et les documents manuscrits ont été pillés ou accaparés. Seul le sort d'une faible portion de ceux-ci a échappé à la perte, mais conservés soit chez des particuliers souvent " anonymes ", soit dans des musées nationaux et internationaux même, comme celui de Berlin.
Habitat et mutations socio-spatiales
L’habitat de Figuig se caractérise par son ancienneté et donc par son originalité. Il est de type fixe à usage permanent. Groupés sous forme de qsour, les habitations traditionnelles se sont implantées à l’origine près des points d’eau. Il s’agit des rives de l’oued Zousfana, unique cours d’eau pérenne passant près de l’oasis et des nombreuses sources habilement exploitées pour l’irrigation.
À l’exception du qsar de Zénaga implanté en plein cœur de la palmeraie, les autres qsour sont tous bâtis en amont des sources, laissant tout terrain irrigable aux cultures. Les anciens hameaux de l’oued Zousfana auraient été délaissés par leurs habitants contraints par l’insécurité à intégrer les
qsours.

La physionomie de l’habitat actuel reflète une évolution par étapes bien distinctes. Dans le passé, l’insécurité due à la fois aux conflits entre qsouriens sédentaires confédérés et tribus nomades et aux différends qui opposaient les différents qsour voisins fut à l’origine des groupements des demeures des populations à l’intérieur des enceintes entourant chaque qsar. Actuellement, il ne subsiste que de rares vestiges de ces enceintes relayées par des tours de gardes érigées aussi dans des jardins.
L’éclatement des qsours en faveur d’une expansion de l’habitat extra-muros débute dès l’instauration du pouvoir colonial avec une administration locale. Ainsi, l’extension de l’habitat se propage surtout sur les terres incultes sans totalement épargner les jardins cultivés.
L'habitat traditionnel de Figuig possède les caractères spécifiques auxquels la rénovation porte des atteintes parfois profondes. La maison traditionnelle est constituée d'un grand nombre de
pièces disposées autour d'une cour centrale encadrée de préaux en colonnes et arcades ouvertes. Elle est habituellement construite en briques de terre séchée et de bois de palmiers, pour des besoins de climatisation par isolation thermique, vu la continentalité du prononcé du climat froid l'hiver et chaud l'été. Les pierres ne sont utilisées en général qu'à la base des murs pour les protéger des dangers des eaux ruisselantes. Les maisons ont habituellement un étage, voire deux, et abritent hommes et bêtes. Elles sont contiguës et desservies par un réseau de rues et de ruelles en partie couvertes, augmentant ainsi la surface habitable des demeures et offrant l'abri aux usagers de la voirie. Un nombre grandissant d'habitations est restauré ou rénové mais avec des matériaux modernes: béton, fer et bois importés, ce qui ne se fait pas sans problèmes.
Les caractéristiques architecturales et urbanistiques locales et traditionnelles risquent de s'estomper graduellement dans un paysage criard associant toutes sortes d'influences étranges liées en partie à l'impact de l'émigration.
Ainsi, au cours des trois dernières décennies, l’habitat traditionnel connut une véritable mutation avec l’élargissement des ruelles qui demeurent non carrossables en général et l’utilisation systématique des nouveaux produits de construction, dont le béton armé et les briques en ciment, dans la plupart des cas, sans changement notable de l’organisation interne des maisons. Il s’agit là d’un impact, limité mais "prometteur", de l’émigration internationale de travail par le biais de transferts financiers grandissants. Les mutations en cours risquent de compromettre l’avenir du patrimoine local, faute de protection, et en absence d’un contrôle des aménagements souvent mal orientés.
À Figuig, la société était quasi-fermée. L'endogamie était la règle à l'intérieur de chaque qsar. Les rivalités entre les qsour surtout contigus empêchaient parfois l'établissement des moindres rapports, et renforçaient en revanche les liens entre les habitants d'un même qsar dont l'entité n'a rien à voir avec la tribu sensu-stricto. Les problèmes des ressources en eau étaient toujours à l'origine des conflits historiques sanglants entre les qsour.
L'ouverture de l'oasis sur le monde moderne par le biais de la colonisation, de l'émigration et l'attachement étroit au pouvoir central, a suscité des mutations socio-spatiales d'ampleur considérable: le pouvoir traditionnel de la "James"" (collectivité) ne règne plus, les rivalités sont du moins atténuées ou oubliées, le mode de vie a changé, l'artisanat est en déclin jusqu'à même menacer les tissages lainiers de réputation historique...L'investissement des transferts monétaires des émigrés dans les secteurs de logement et d'agriculture à Figuig ralentit sensiblement au profit de nouveaux secteurs d'investissement dans les grandes villes marocaines.